Cosmologie portative ⟡ Alessandro De Francesco
Compagnonnage, celador, Bruxelles, 25-27.09.2025
Alessandro est poète, artiste et essayiste. Il vit entre Bruxelles et Turin. Au cours de l'été, il s'est rendu dans le Yorkshire du Nord, au Royaume-Uni, à la recherche de pierres sphériques. La présentation comprend certains de ces objets, accompagnés d'un poème immersif à découvrir en réalité virtuelle et d'une pièce sonore.
En tant que médiateur ou vecteur, l'artiste re-oriente la matière, l'espace et la pensée dans un microcosme qui remet en question les textes et les langues. L'événement débutera le jeudi 25 septembre à partir de 18 heures, avec un moment d'écoute collective de la nouvelle œuvre sonore d'Alessandro et une brève conversation entre l'artiste et Antoinette Jattiot, curatrice, autrice, écrivaine et enseignante basée à Bruxelles. L'évènement se cloturera par une conférence-performance de l'artiste le samedi 27 septembre à 17 heures.
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Prose-poème de l'artiste, extrait d'un entretien mené pour le texte d'exposition
"Je collectionne des pierres sphériques que je recueille dans des conditions atmosphériques diverses, à des latitudes hétérogènes. Elles me permettent de réduire la distance qui me sépare des planètes. J’attends la descente des marées, puis je parcours la descente vers la plage, mon mouvement suit une direction, alors que les tiges autour, qui parsèment les champs, sous la lumière verte des électrons, oscillent en avant et en arrière. Parfois un corps est posé dans un sachet et saigne dans l’herbe. Il faut alors suspendre la recherche et en prendre soin. Le temps du soin est variable mais il est toujours dédié à la tentative de penser la gravité et l’électromagnétisme comme une seule et même force, la gravité fuyant en partie au-delà de la membrane. Dans un état parallèle, il est indispensable pour le corps dans l’herbe que la mémoire soit dirigée, bien que temporairement, à un café internet dans une ville étrangère, à une époque différente de la conscience. Devant les cabines téléphoniques et les ordinateurs, on pouvait acheter des dragées et les dissoudre dans le ciel violet du soir avant de remarquer que les trottoirs de la ville étaient couverts par des pas, des ormes et des ombres d’une civilisation passée et en mouvement. Plus personne n’est là maintenant, lors de la descente vers la plage, tous les regards échangés dans le métro se sont perdus dans une nébuleuse sans identités, et les seuls voiles à enlever sont ceux du présent. C’est ainsi qu’on se lève au-dessus de la couverture en laine brodée avec des carrés, dans la hutte, dans la neige, pour un tout autre voyage où les affects ne sont plus la conséquence du besoin de nourriture. Une fois arrivé en bas, à la plage, j’avance hors du couloir, je recherche, c’est mon présent, dans les piscines rocheuses, et ma recherche a des caractéristiques différentes de celles qu’elle aurait eues auparavant, car elle est intriquée avec la respiration régulière d’un être qui le soir dort à côté de moi. J’avance vers l’horizon, mais je regarde par terre et je recueille de rares pierres, jusqu’au bord qui sépare le sable de l’eau avec une ligne courbe. Un coup de vent me rappelle le lien entre le poids de cette matière que je tiens entre mes mains et l’immatérialité de l’invisible, que les grains, les spores et les pensées humaines partagent et échangent. Je reconnais la nature de cette continuité sans comprendre les raisons à son origine, et j’accepte que la pierre que je tiens entre mes mains reste une énigme au fond d’un trou circulaire, là où circule l’eau de la mer qui pénètre dans le sable et ce faisant elle s’apparente à l’horizon et aux trois couleurs élémentaires. Peut-on parler de naissance ? – je me demande en remontant la pente pendant que les tiges ne cessent d’osciller, jaunies par la lumière qu’elles cherchent pour vivre. Puis la force à exercer pour remonter vers la route occupe toute mon attention."